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DEUX FOIS DEUX ESPACES

Quatuor Watt
Julien Pontvianne clarinette
Jean Dousteyssier clarinette
Joris Rühl clarinettes
Jean-Brice Godet clarinettes

Festival Écoute voir du Petit faucheux
14 janvier 2017

L'étrangeté de cette très belle expérience, ça n'est pas que cette musique au flux continu altère notre perception du temps, c'est qu'elle annule notre inscription dans l'espace. Il y a bien sûr, l'espace physique du sous-sol de la Chapelle Sainte-Anne dans lequel nous sommes réunis, auditeurs, avec les musiciens, ici au centre de notre assemblée, dans une pénombre qui aide à entrer dans le rêve, parmi des sculptures d'Olivier de Sagazan qui tiennent de l'homuncule encore attaché à sa mandragore, bien sûr, il y a toujours cet espace physique mais en esprit nous ne sommes plus là, nous sommes entrés à l'intérieur du son, et c'est dans ce milieu que nous voguons pour un voyage dont nous ne savons plus estimer la durée, un voyage qui nous libère de nos repères habituels et nous les fait éprouver comme des paradoxes. Nous entrons dans un son que nous percevions comme une longue unité et qui se révèle, une fois entré dans sa matière, d'une diversité, d'une richesse insoupçonnables, un son que nous percevions comme lisse et qui se révèle fourmillant d'événements auxquels cette musique qui nous a fait changer d'échelle nous rend pleinement sensibles en débridant nos facultés de perception. Il s'est produit que pendant toute la durée du souffle continu des quatre musiciens, notre monde a changé.

Isabelle Duthoit
Gaëlle Guéranger

Je me souviens avoir vu une chanteuse indienne dessiner de la main le tracé de son chant dans l'espace. Isabelle Duthoit explore toutes les possibilités, extraordinaires, de l'instrument qu'est as voix, en-dehors de ce que nous convenons d'appeler chant, et elle donne une danse, une très belle danse des mains, de la tête et du visage, en figurant la musique sauvage qui lui sort de la gorge par des gestes des mains, par des expressions et par des regards. Ses mains dessinent dans l'espace l'image du son qu'elle projette, spectaculairement, sa durée, son déploiement, son prolongement hors du corps, du ventre, de la poitrine, de la gorge, du crâne de la musicienne. Et elle est d'une puissance inouïe.

À cette danse du chant, Gaëlle Guéranger répond par un corps en relation avec le sol qui l'oriente et qu'il parcourt entre les bustes, les moulages, les têtes de cheval en plâtre de l'atelier de la chapelle du Petit Saint-Martin où le duo se produit.

Extraits des Chroniques pour Impro Jazz
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et
Écoutes au Petit faucheux
https://petitfaucheux.fr/
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Avec l'aide de l'agence culturelle de la région Centre-Pays de Loire : CICLIC
http://www.ciclic.fr/