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Mille centres de forces
Extraits

Tirés de Volodine, etc. - Post-exotisme, poétique, politique, Detue (Frédérik), Ruffel (Lionel) dir., éd. Classiques Garnier, coll. « Littérature, histoire, politique » n°8, Paris, 2013, pp. 151-159

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     1985, Minuit. Claude Simon prix Nobel, une portée de minuistes du second niveau perce l’œuf, plus ou moins fils d’Alain Robbe Grillet, pendant que couvent, encore cachés par Hervé Guibert, les futurs organismes autofictifs, plus ou moins filles de Marguerite Duras qui vient de publier chez POL. Le cosmos achève de se replier, de rétracter son expansion pleine de poussières, de suturer ses noirs, de se refermer sur sa matière. Dans ce sans-ailleurs de dessous les couvertures blanches dédiées au divan puis à l’amphithéâtre, déboule, du milieu de « Présence du futur », collection passionnante sur laquelle, même en se pinçant le nez, pas un littérateur grand genre n’aurait été jeter les yeux, un Volodine bébé, avec, comme cri de naissance, un formidable « saloperies vivantes ! », comme acte, la décapitation du tyran, comme langage, la prophétie, comme humeur, le venin qui se révélera être un suc de cactus, comme identité, les multiples de soi. Et l’univers trouve un espace à nouveau, un interstice où se déployer selon d’énigmatiques lois : une puissance y respire.

     Bouclée dans la salle de bain, condamnée à la petite ironie, bientôt réduite aux aléas d’une libido que bien des soucis compliquent, la littérature française se trouve, par l’irruption Volodine, clandestinement raccordée au monde, à cette sale histoire collective qui, le défaisant, nous fait, dans un trouble dont elle doit trouver les formes qui l’expriment.
[…]

     Volodine est une œuvre, faite de voix dont la provenance est incertaine ou évanouie, qui persistent d’une bouche à l’autre, qui se relaient et qui se portent plus souvent qu’elles ne se contredisent : la dialectique est un passé.

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